Qui est Maurice Genevoix, ce soldat méconnu de la littérature qui est entré au Panthéon ?

Biographie de Maurice Genevoix

Maurice Genevoix est né en 1890 dans la Nièvre. Il perd sa mère à l’âge de douze ans. Brillant élève, il entre comme pensionnaire au Lycée Lakanal de Sceaux puis à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm. Mobilisé dès le début de la Première Guerre mondiale, il participe aux combats jusqu’à ce qu’il soit grièvement blessé en avril 1915. Ayant perdu l’usage de son bras gauche, Maurice Genevoix est réformé et entreprend alors l’écriture de son témoignage de la Grande Guerre, mettant de côté sa carrière universitaire. Ses carnets de guerre paraissent en cinq volumes entre 1916 et 1923 puis sont publiés dans un recueil intitulé « Ceux de 14 ». Il poursuit son travail d’écrivain, se consacrant surtout au récit du monde rural de sa Loire natale et à la description de la nature en harmonie avec les hommes. Il reçoit le Prix Goncourt pour son roman Raboliot en 1925. En 1946, il est élu à l’Académie française et en devient le secrétaire perpétuel en 1958, poste dont il démissionnera en 1974 pour se remettre à l’écriture de romans. Il meurt le 8 septembre 1980. Le 6 novembre 2018, à l’occasion du centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale, Emmanuel Macron a annoncé l’entrée au Panthéon de l’écrivain.

Ce qu’il faut savoir sur l’écrivain Maurice Genevoix qui entre au Panthéon

L’écrivain Maurice Genevoix à fait ce 11 novembre, à 18 h, son entrée au Panthéon. L’écrivain est honoré avec tous les combattants de la génération sacrifiée par la guerre 14-18, auxquels il a rendu hommage dans son livre « Ceux de 14 ».

[Source : Ouest-France]

Celui qui franchit le seuil du Panthéon aujourd’hui n’est pas un homme seul. Maurice Genevoix entre accompagné de ses camarades tombés à Verdun, et par-delà, de tous les morts de la boucherie de 14-18. L’écrivain a vécu toute sa vie entourée de ses fantômes, auxquels il a rendu un si bel hommage dans « Ceux de 14 ».

L’intention du président de la République était d’ailleurs bien d’honorer tous les morts de la Grande Guerre, lorsqu’il a décidé, le 6 novembre 2018, de la panthéonisation de leur « porte-étendard ».

« La baraka »

Né dans la Nièvre en 1890, Maurice Genevoix était promis à un brillant avenir de Normalien et avait le désir de devenir écrivain. La guerre devait malheureusement lui fournir la matière, faite de boue et de sang, de ses premiers livres. Lors de la bataille de La Marne, puis en marchant sur Verdun, il remplit des carnets sur son terrible quotidien.

« Lieutenant, il a vu énormément de ses hommes tomber, rapporte Jean-Yves Le Naour, historien, auteur d’un livre très documenté (1). Lui était connu pour avoir la baraka. Plusieurs fois, il avait frôlé la mort. Il avait la réputation d’être intuable. »

L’historien rapporte la scène saisissante au cours de laquelle le combattant s’arrête pour fermer les yeux d’un jeune soldat. Il est fauché par trois balles. C’était le 25 avril 1915, dans la Meuse, aux Éparges, bataille au cours de laquelle 12 000 hommes ont été tués. Invalide à 70 %, Maurice Genevoix gardera le souvenir de cette bataille dans sa chair. Son bras gauche sera paralysé.

Le destin l’avait-il épargné pour qu’il témoigne ? Pendant ses sept mois d’hôpital, il noircit des pages. C’est ainsi que naît « Sous Verdun ». Viendront quatre autres livres, qui racontent huit mois de combat, et seront réunis sous le titre de « Ceux de 14 ». Une prose terrible, réaliste et émouvante, dans laquelle il raconte les souffrances, l’agonie des blessés, mais aussi la camaraderie des tranchées.

« Il a écrit pour arracher ses morts à l’oubli, poursuit Jean-Yves Le Naour. Ce faisant, il a inventé la littérature de témoignage, un nouveau style dans lequel les personnages sont vrais. Il a fait revivre ses hommes, afin qu’ils ne meurent pas une deuxième fois. Il est de notre temps car il a une lecture compassionnelle, il ne s’engage pas mais décrit la souffrance des hommes. »

Ce souci de réalisme lui vaudra la censure. « Anastasie », comme on appelle ironiquement cette dernière, ne supporte pas que l’on démoralise les troupes. Elle veut des écrits héroïques, pas des récits de panique, ni des scènes dans lesquelles des soldats de la Nation se livrent à des pillages.

Le souvenir du Poilu

Celui qui est un des plus grands peintres de cette guerre verra ensuite, en 1916, le Goncourt échapper à « Sous Verdun ». Certes, « au profit du Feu, chef-d’œuvre d’Henri Barbusse », rapporte Jean-Yves Le Naour. Il transformera l’essai en 1925 avec Raboliot, l’histoire d’un braconnier solognot.

Car en 1918, Maurice Genevoix est parti panser ses plaies au bord de cette Loire qu’il adore. Il est revenu à Saint-Denis-de-L’Hôtel, ville du Loiret où il a grandi. C’est là qu’il devient cet écrivain que d’aucuns qualifient avec un peu de mépris de « régionaliste », grand pourvoyeur de dictées dans les écoles.

Il retrouvera plus tard la joie de vivre, devenant père à plus de 50 ans, retournera à Paris, deviendra académicien. Sa fille et son gendre, Sylvie Genevoix et Bernard Maris, son petit-fils, Julien Larere-Genevoix, ont beaucoup œuvré à sa panthéonisation. Celle-ci n’est que justice. Décédé en 1980, à 92 ans, le dernier des écrivains combattants n’avait cessé de témoigner, et personnifiait le souvenir du Poilu.

(1) La gloire et l’oubli, Michalon

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